URFIG |
URFIG |
Campagne AGCS
L’OMC ET L’UE, ACTEURS DECISIFS
DE
LA « PETROLISATION » DE L’EAU
(Dr
Raoul Marc JENNAR, 18 mars 2003)
Les Accords de
Marrakech, signés en 1994 au terme de l’Uruguay Round, fournissent le cadre
institutionnel et normatif de la marchandisation de la planète. Un de ces
Accords crée l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Un autre organise la
programmation de la privatisation complète de tous les secteurs de tous les
services, c’est l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS). Dans
ce cadre unique d’une gouvernance mondiale effective, basée sur les seules règles
de la concurrence commerciale, l’Union européenne (UE) joue un rôle très
agressif comme moteur de la « pétrolisation » de l’eau. L’eau
qui, selon l’UE, ne peut plus être considérée comme un élément
constitutif du patrimoine commun de l’humanité, mais bien comme une
marchandise qui doit être traitée sur les marchés à l’instar du pétrole.
La conférence ministérielle
de l’OMC, lorsqu’elle s’est réunie en novembre 2001 à Doha, a donné une
impulsion extrêmement forte au processus de « pétrolisation » de
l’eau. Sur proposition de l’Union européenne, trois décisions majeures ont
été prises qui s’inscrivent à la fois dans le cadre du cycle de négociations
décidé à Doha, mais également dans le processus continu de mise en œuvre de
l’AGCS.
L’OMC a inscrit dans
le programme des négociations qui doivent se terminer le 1 janvier 2005
« la réduction, voire, si c’est approprié, l’élimination des
obstacles tarifaires et non tarifaires aux biens et services environnementaux. »
[point 31 (iii) de la déclaration ministérielle]. Les ministres ont convenu également
que ces négociations devaient accorder une « attention particulière »
à « l’effet des mesures
environnementales » afin de veiller à « l’élimination ou
la réduction » des distorsions que pourraient provoquer de telles
mesures pour le commerce ; ils ont indiqué que les travaux sur ces
questions devaient déboucher sur des résultats compatibles avec le caractère
non discriminatoire des règles commerciales (point 32).
Par ailleurs, toujours
sur proposition de l’UE, les ministres réunis à Doha ont donné un coup
d’accélérateur aux négociations sur la mise en œuvre de l’AGCS en
ordonnant à chaque Etat de présenter le 30 juin 2002 la liste des services
qu’il veut voir libéralisés chez les autres Etats membres de l’OMC et, le
31 mars 2003, de communiquer la liste des services qu’il s’engage à libéraliser
chez lui.
«Aucun Etat
n’est obligé d’engager un secteur de services dans un processus de libéralisation,»
répètent à satiété les défenseurs de l’AGCS, au premier rang desquels on
trouve le Commissaire européen Pascal Lamy. Avec le processus décidé à Doha,
cette affirmation relève désormais de la théorie, puisque chaque Etat est
soumis aux demandes de libéralisation des autres et est lui-même obligé d’offrir
(c’est le terme utilisé) des secteurs de services au
Moloch du libre-échange absolu.
Ainsi donc, en
agissant à la fois par le biais du programme de Doha et par celui de l’AGCS,
l’UE s’est assurée que des progrès substantiels dans le processus de
« pétrolisation » de l’eau seront atteints.
Pour mesurer les
risques réels de voir cette « pétrolisation » de l’eau devenir réalité,
il faut garder à l’esprit l’idéologie dominante qui inspire les Accords de
Marrakech, la puissance de l’OMC et le caractère contraignant de l’AGCS.
Les instruments de
l’idéologie marchande
Avec les Accords
de Marrakech que gère l’OMC, on est entré dans une transformation globale
des rapports en tous genres qui régissent la vie des humains. La doctrine qui
s’impose au travers de ces accords est celle d’un libre échange sans
limites. Les rapports humains sont assimilés à des rapports marchands.
Il sont soumis aux règles du commerce qui exigent l’absence de toute forme de
discrimination, c’est-à-dire l’absence de toute prise en considération des
particularités individuelles ou collectives.
A
terme si on n’y prend garde, plus aucun Etat n’aura le droit de mettre en
oeuvre des politiques spécifiques qui tiennent compte des particularités, des
besoins et des priorités nationales ou qui expriment un mode précis de vouloir
vivre ensemble. Des choix économiques et fiscaux, des préférences sanitaires,
sociales, environnementales et éthiques seront assimilés à des « entraves
au commerce .» C’est vrai dans les pays riches comme dans les pays en développement.
Tous les Etats devront renoncer à leurs législations propres et soumettre
leurs ressortissants aux règles de la concurrence commerciale qui privilégient
ipso facto les intérêts particuliers
les plus puissants.
A
terme, si on n’y prend garde, tout, le solide comme le liquide, le minéral,
le végétal, l’animal, l’humain et ce que l’humain crée et produit, tout
sera à vendre et à acheter. Tout.
L’OMC
est aujourd’hui l’organisation internationale la plus puissante du monde
parce qu’elle concentre le pouvoir de faire les règles, de les appliquer et
de sanctionner les pays qui ne les respectent pas, parce qu’elle est la seule
institution internationale qui dispose du pouvoir d’imposer le respect des règles
qu’elle gère, parce que ces règles dépassent très largement les questions
strictement commerciales et parce que l’OMC fonctionne dans des conditions
d’opacité et d’oligarchie qui soumettent les pays qui en sont membres à la
volonté des plus puissants (Europe, Etats-Unis, Japon, Canada). Avec l’OMC et
les pouvoirs qu’elle est la seule à détenir, le droit de la concurrence
l’emporte sur tous les autres droits et en particulier les droits économiques,
sociaux et environnementaux reconnus aux citoyens par les dispositions
constitutionnelles ou légales adoptées dans le cadre national ou dans le cadre
de pactes internationaux.
L’AGCS
est l’instrument juridique international par lequel, au sein de l’OMC, les
pays industrialisés entendent appliquer radicalement la doctrine du libre échange
au secteur tertiaire, le secteur de la vie économique et sociale qui regroupe
l’ensemble des services. Tous les Etats membres de l’OMC sont tenus
d’appliquer les dispositions contenues dans l’AGCS.
L’AGCS,
la machine à privatiser l’eau
L’AGCS est un traité
international dont la cible, explicitement indiquée, est formée par «les
mesures qui affectent le commerce des services » (article 1,1- portée),
le terme « mesures » signifiant pudiquement les législations,
réglementations et procédures et toutes les décisions administratives
nationales, régionales et locales (article 28 – définitions) prises par
« des gouvernements ou administrations centraux, régionaux ou locaux
et par des organismes non gouvernementaux lorsqu’ils exercent des pouvoirs délégués »
par les pouvoirs publics (article 1,3 a).
L’AGCS entend donc
agir sur les législations et les réglementations nationales et locales en ce
compris lorsqu’elles concernent des institutions privées qui remplissent des
missions d’intérêt général.
Dans quel but ?
Comme l’affirment les considérants 2 et 3 du texte ainsi que son article 19 :
« élever progressivement le niveau de libéralisation du commerce des
services. »
Comment ? Par «des
séries de négociations successives qui auront lieu périodiquement. »
Lors de chaque série de négociations, chaque Etat sera invité à procéder à
de nouvelles libéralisations de secteurs de services qu’il ne s’était pas
jusqu’alors engagé à libéraliser (article 19).
De quels services
s’agit-il ? Le texte est très clair : il s’agit de « tous
les services de tous les secteurs à l’exception des services qui ne sont
fournis ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec un ou plusieurs
fournisseurs de services « (article 1, 3 b et c). On s’en rend
compte, à l’exception de certains services régaliens de l’Etat (la défense,
la justice, les services administratifs des pouvoirs centraux et locaux), tous
les services sont soumis à l’AGCS. De l’éducation aux parcs naturels en
passant par les services liés à la politique de l’eau, l’OMC a inventorié
pas moins de 160 secteurs de services différents.
L’AGCS est donc
l’instrument international par lequel va être imposée une dérégulation
massive des normes, règlements et procédures nationaux et locaux dès lors
qu’ils concernent la fourniture d’un service. La prospection, la protection
et la gestion des nappes aquifères, la captation, la purification et le
stockage de l’eau, sa distribution et le traitement des eaux usées sont des
activités qui tombent sous le couperet de l’AGCS.
L’AGCS agit sur les
législations, réglementations et procédures existantes par diverses
approches. Il impose des obligations à tous les Etats membres de l’OMC et aux
pouvoirs subordonnés au travers de quatre modes de fourniture des services
(article 1,2) :
- Mode 1 : la
fourniture transfrontalière de services ; ex. : un fournisseur
(public, semi public ou privé) d’eau potable dans un pays A qui en fournit également
dans un pays B ;
- Mode 2 : la
consommation transfrontalière de services ; ex : un citoyen, un
groupe de citoyens ou une entreprise d’un pays A qui consomment de l’eau
dans un pays B ;
- Mode 3 : un
fournisseur de services d’un pays A qui s’installe sur le territoire d’un
pays B ; une firme privée d’un pays A spécialisée dans le traitement
des eaux usées qui s’implante dans un pays B (on notera qu’on se trouve ici
en présence d’un accord multilatéral sur l’investissement dans le domaine
des services) ;
- Mode 4 : la
possibilité pour un fournisseur de services d’un pays A de faire appel à du
personnel d’un pays B, pour une période déterminée, avec les règles
salariales et sociales du pays B ; ex : une entreprise de traitement
des eaux usées d’un pays doté de règles en matière de salaires, de
conditions de travail, de protection sociale qui fait appel pour un an à du
personnel venant d’un pays où ces règles sont inexistantes ou moins
avantageuses.
A tous les Etats
membres de l’OMC, l’AGCS impose en particulier deux obligations générales :
le traitement de la nation la plus favorisée et la transparence.
Le traitement de la
nation la plus favorisée oblige chaque Etat à accorder à tous les
fournisseurs de services de tous les Etats membres le même traitement que celui
qu’il accorde au fournisseur de service de l’un d’entre eux. Un Etat A qui
a concédé des immunités fiscales à une entreprise de pompage d’eau d’un
pays B, est obligé de faire une concession identique aux entreprises de pompage
d’eau de tous les Etats membres de l’OMC.
Au titre de la
transparence, chaque Etat doit fournir à l’OMC l’ensemble de ses législations,
réglementations et procédures nationaux et locaux en rapport avec la
fourniture de services. Les USA proposent que ces « mesures » soient
soumises à l’OMC avant d’être approuvées par les institutions nationale
ou locales compétentes. Un certain nombre d’acteurs politiques européens ne
sont pas du tout hostiles à cette proposition comme le démontre la réaction
du président de la Région de Bruxelles à la proposition de privilégier des
produits provenant du commerce équitable pour les cantines des écoles et des
administrations et qui a estimé qu’une telle proposition devait être préalablement
soumise à la Commission européenne et à l’OMC.
L’AGCS entend aussi
soumettre les Etats à des « disciplines » en matière de
subventions afin que celles-ci n’exercent pas des effets de distorsion sur le
commerce des services (article 15) Ces « disciplines » seront
élaborées au sein de l’OMC.
Dès lors qu’un Etat
prend l’engagement de libéraliser un secteur de services donné, l’AGCS
impose des obligations spécifiques. Elles concernent la transparence, les législations
et réglementations intérieures, l’accès au marché et le traitement
national .
Mais que signifie
prendre un engagement ? Cela veut dire tout d’abord que, lors d’une
phase de négociations, l’Etat indique, pour le secteur concerné, l’état
de libéralisation. Cela signifie, automatiquement, que cet état de libéralisation
est protégé contre toute nouvelle forme d’intervention des pouvoirs publics.
L’engagement porte ensuite sur les intentions de l’Etat par rapport à ce
secteur : ce qu’il se propose à libéraliser davantage, pour quel mode
de fourniture de services et, éventuellement, les limites qu’il impose à ce
processus, ces limites au processus de libéralisation étant susceptibles d’être
revues lors d’une autre phase de négociations.
Pour chaque secteur
engagé dans le processus de libéralisation, les obligations spécifiques auxquelles
est soumis chaque Etat se présentent comme suit :
- au titre de la
transparence, fournir à l’OMC au moins chaque année, les nouvelles
dispositions normatives et réglementaires ainsi que les modifications aux
dispositions existantes en rapport avec le secteur concerné ;
- en ce qui concerne
les législations, réglementations et procédures légales et administratives
des pouvoirs centraux, régionaux et locaux des Etats, celles-ci ne pourront pas
être « plus rigoureuses que nécessaire » afin de ne pas
constituer des « obstacles non nécessaires au commerce des services »
(article 6.4). L’AGCS confie à l’OMC le soin d’élaborer des «disciplines»
qui identifieront ces obstacles. Parmi les propositions en discussion : les
critères de définition de l’eau potable, les normes de qualification
professionnelle, les normes de sécurité sur les lieux de travail, les tarifs
préférentiels imposés par les pouvoirs publics en faveur des personnes nécessiteuses
pour l’eau, l’électricité, le gaz et le téléphone, le salaire minimum
garanti… ; on notera qu’en vertu de l’article 6.5, ces disciplines se
substitueront aux « normes internationales des organisations
internationales compétentes » une fois que l’OMC les aura adoptées ;
- si des engagements
sont pris en matière d’accès aux marchés pour un secteur donné, l’Etat
n’a plus le droit d’imposer une série de limitations portant sur le nombre
de fournisseurs, sur la valeur des transactions, sur le nombre total d’opérations,
sur le nombre de personnes physiques employées, sur les types d’entités
juridiques, sur le volume du capital étranger investi ;
- pour tout secteur
pour lequel un engagement est pris, la règle du traitement national
s’applique. Elle consiste à accorder aux fournisseurs de services étrangers
le même traitement qu’aux fournisseurs de services nationaux.
Ces obligations
spécifiques ont des conséquences importantes :
a)
quand un pays prend un engagement d’accorder, sans restrictions, un accès au
marché aux fournisseurs de services, cela signifie qu’il doit renoncer au
monopole de service public dans les secteurs concernés ;
b)
quand un pays prend un engagement d’accorder sans restriction le traitement
national à un secteur de services, cela signifie que dans ce secteur, toute
forme de distinction entre secteur marchand et secteur non-marchand doit disparaître,
car il est interdit d’accorder à des services de ce secteur des subventions,
des prêts, des garanties sur prêts, des dons ou quoi que ce soit qui pourrait
altérer la libre concurrence ;
c)
l’application du principe du traitement national conduit, quasi mécaniquement,
de la libéralisation à la privatisation, car les pouvoirs publics seraient
financièrement asphyxiés s’ils devaient respecter ce principe ;
d)
ces engagements mettent fin au libre choix démocratique. En effet, les règles
relatives à l’accès au marché et au traitement national vont enlever aux
institutions démocratiques tout pouvoir d’adopter des politiques conformes
aux besoins particuliers de la localité, de la province, du département, de la
région ou de l’Etat. En outre,
une fois un engagement pris, il est irréversible. En effet, l’article 21 de
l’AGCS précise que tout Etat qui voudrait modifier ses engagements dans un
sens qui ne va pas vers plus de libéralisation aurait à négocier avec tous
les autres Etats membres de l’OMC des compensations financières qu’ils
seraient en droit d’exiger. En cas de désaccord, c’est l’organe de règlement
des différends de l’OMC qui trancherait. Ce qui signifie très clairement que
les citoyens, au travers des élections, n’ont plus la possibilité de
renverser les choix d’un gouvernement dont les conséquences se seraient avérées
dommageables pour la collectivité.
L’agressivité
néo-libérale de l’Europe
Le
30 juin 2002, en application des décisions prises à Doha qu’elle avait
inspirées, la Commission européenne, au nom des peuples d’Europe, a demandé
à 109 pays de s’engager à libéraliser un certain nombre de secteurs de
services chez eux. Ces 109 documents ont fort heureusement été divulgués
alors que la Commission, profitant de la complicité ou de l’indifférence des
15 gouvernements, avait imposé le secret absolu.
L’étude
de ces documents est édifiante : l’Europe vise en premier lieu les
services environnementaux : sur 109 demandes, 72 pays font l’objet de
demandes européennes de libéralisation de l’ensemble des services relatifs
à l’eau de consommation et au traitement des eaux usées. Ces demandes
concernent également les systèmes non lucratifs de distribution d’eau.
Chaque fois, la Commission européenne demande que le pays s’engage à
appliquer le traitement national et l’accès au marché pour la
prospection, la protection et la gestion des nappes aquifères, la captation, la
purification et le stockage de l’eau, sa distribution et le traitement des
eaux usées. Tous les pouvoirs publics sont ciblés, de l’Etat central à la
commune.
Illustrant
son mépris pour les choix démocratiques des peuples, la Commission européenne
a spécifiquement demandé à des gouvernements de libéraliser le secteur de
l’eau dans des pays où, sous la pression des habitants et des élus, un
processus de libéralisation de l’eau engagé par le gouvernement a été, il
y a peu, rejeté ou limité : Bolivie, Egypte, Panama, Paraguay.
En
outre, dans plusieurs lettres échangées en mai-juin 2002 avec Suez-Lyonnaise
des Eaux, et signées par Ulrike Hauer, des services de Pascal Lamy, la
Commission européenne a confirmé sa détermination à user pleinement des
possibilités de l’article 6,4 de l’AGCS et de son intention de faire
adopter des «disciplines.» Elle a demandé à cette firme privée de
lui communiquer les législations et réglementations qui, pays par pays,
« affectent vos opérations de manière négative », en
insistant sur les normes nationales qui imposent le service universel.
Enfin,
comme le souligne la juriste américaine Lori Wallach, l’accès libéralisé
aux eaux souterraines ouvre la voie à la privatisation des nappes phréatiques.
Et ainsi pourra se terminer le processus complet de « pétrolisation »
de l’eau.
On
ne peut que le constater, la priorité de la Commission européenne, qui bénéficie
du soutien des 15 gouvernements européens, c’est de donner satisfaction à
Vivendi, à Suez-Lyonnaise des Eaux, à Thames Water et à AquaMundo. Pas aux
citoyens européens et encore moins aux habitants de 72 pays dans le monde parmi
lesquels les pays les plus pauvres.
Le
programme de Doha
Ce
que la Commission européenne n’obtiendra pas dans le cadre de l’actuelle
phase de négociations de l’AGCS et dans le grand troc auquel elle va donner
lieu, elle pourra tenter de l’obtenir dans le mise en œuvre des points
31(iii) et 32 de la déclaration ministérielle de Doha (voir supra).
La
décision de Doha vise l’eau doublement, à la fois comme un « bien »,
mais également comme un service. Or, dans la classification du GATT, l’eau
est identifiée comme un bien. Dans le cadre du GATT, un « bien »
peut faire l’objet de mesures tarifaires, ce qu’excluent les recommandations
du point 32 de la déclaration de Doha. Ce point indique clairement que des
« barrières non tarifaires », c’est-à-dire, par exemple, des
normes sociales ou environnementales, ne peuvent contrarier les règles de la
concurrence commerciale telles qu’elles sont établies par d’autres accords
de l’OMC comme celui relatif aux obstacles techniques au commerce ou celui
concernant les règles sanitaires et phytosanitaires qui impose des limites aux
mesures que peuvent prendre les gouvernements en ce qui concerne la santé des
plantes et des animaux.
Maintenir
l’eau hors de l’AGCS ; sortir les biens et services environnementaux de
l’OMC
C’est
l’UE qui tente d’intégrer l’eau et les services environnementaux dans
l’AGCS. C’est l’UE qui a obtenu que commence une négociation sur les
biens et services environnementaux dans le cadre de l’OMC. C’est la
Commission européenne et les quinze gouvernements qui la soutiennent qui
portent cette responsabilité et qu’il faut sanctionner.
Il
n’y a pas de fatalité. Des alternatives existent. Les négociations décidées
à Doha peuvent être bloquées ; la mise en œuvre de l’AGCS peut être
suspendue. C’est une question de volonté.
Dr
Raoul Marc JENNAR
Chercheur auprès d'Oxfam Solidarité
(Bruxelles) et de l'URFIG (Bruxelles-Paris-Genève),