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Campagne AGCS
(Dr
Raoul Marc JENNAR, 15 avril 2003)
Cet article fera partie d’un dossier sur l’école publié
par
la revue française Res Publica, à paraître dans le n° 34, fin août 2003.
On
pourrait trouver ce titre provocateur. C’est pourtant ainsi que s’intitulait
le document de base[i][i] élaboré par les services de
l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à la veille des négociations sur
la mise en œuvre de l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS).
Pour
les protagonistes de cet accord, aux premiers rangs desquels les documents
qu’ils produisent ou cautionnent obligent à placer la Commission européenne
et les quinze gouvernements qui la soutiennent, l’éducation n’est plus un
droit assuré par un service, ce n’est plus qu’un marché qu’il faut impérativement
ouvrir à la concurrence. La grande ambition inscrite dans les textes les plus
fondamentaux sur le droit pour tous au savoir est reléguée aux oubliettes. Mme
Viviane Reding, commissaire européenne à l’éducation et à la culture
l’affirmait dans un récent article : « il faut rendre nos
universités compétitives sur le marché mondial de l’enseignement supérieur. [ii][ii]» Elle faisait ainsi écho à
une déclaration du représentant de l’Union européenne auprès de l’OMC
affirmant, en juin 2000, « l’éducation et la santé sont mûres pour
la libéralisation. » Ce n’est plus l’éducation pour tous ;
à l’avenir ce sera l’éducation pour ceux qui peuvent la payer ! On
entre dans le 21e siècle en rétrogradant au 19e.
Comment
en est-on arrivé là ?
C’est
dans le cadre de l’Uruguay Round qu’ont été négociés les Accords de
Marrakech. Ces accords ont été signés par les gouvernements en 1994 et ratifiés
par les parlements l’année suivante. La responsabilité des élus est donc
entière. Ces Accords qui, notamment, créent l’OMC, constituent le corpus même
de la globalisation. Ils ne sont pas le résultat d’une fatalité, mais bien
l’effet d’une volonté ou, à tout le moins, d’une complicité des acteurs
politiques avec les décideurs économiques transnationaux très présents tout
au long des huit années de négociations de l’Uruguay Round.
L’OMC
est aujourd’hui l’organisation internationale la plus puissante du monde. En
effet, elle concentre le pouvoir de faire les règles, de les appliquer et de
sanctionner les pays qui ne les respectent pas. De plus, elle est la seule
institution internationale qui dispose du pouvoir d’imposer le respect des règles
qu’elle gère. En outre, ces règles dépassent très largement les questions
strictement commerciales. Enfin, l’OMC fonctionne dans des conditions
d’opacité et d’oligarchie qui soumettent les pays qui en sont membres à la
volonté des plus puissants (Europe, Etat-Unis, Japon, Canada).[iii][iii] Avec l’OMC et les pouvoirs
qu’elle est la seule à détenir, le droit de la concurrence commerciale
l’emporte sur tous les autres droits et en particulier les droits humains
fondamentaux, les droits économiques, sociaux et environnementaux reconnus aux
citoyens par les dispositions constitutionnelles ou légales adoptées dans le
cadre national ou dans le cadre de pactes internationaux.
L’AGCS,
la machine à privatiser l’éducation
L’AGCS
est un des accords gérés par l’OMC dont la cible est formée par «les
mesures qui affectent le commerce des services » (article 1,1- portée),
le terme « mesures » signifiant pudiquement les législations,
réglementations et procédures et toutes les décisions administratives
nationales, régionales et locales (article 28 – définitions) prises par
« des gouvernements ou administrations centraux, régionaux ou locaux
et par des organismes non gouvernementaux lorsqu’ils exercent des pouvoirs délégués »
par les pouvoirs publics (article 1,3 a).
L’AGCS
entend donc agir sur les législations et les réglementations nationales et
locales en ce compris lorsqu’elles concernent des institutions privées qui
remplissent des missions d’intérêt général.
Dans
quel but ? Comme l’affirment les considérants 2 et 3 du texte ainsi que
son article 19 : « élever progressivement le niveau de libéralisation
du commerce des services. »
Comment ?
Par «des séries de négociations successives qui auront lieu périodiquement. »
Lors de chaque série de négociations, chaque Etat sera invité à procéder à
de nouvelles libéralisations de secteurs de services qu’il ne s’était pas
jusqu’alors engagé à libéraliser (article 19).
De
quels services s’agit-il ? Le texte est très clair : il s’agit de
« tous les services de tous les secteurs à l’exception des services
qui ne sont fournis ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec un ou
plusieurs fournisseurs de services « (article 1, 3 b et c). On s’en
rend compte, à l’exception de certains services régaliens de l’Etat (la défense,
la justice, les services administratifs des pouvoirs centraux et locaux), tous
les services sont soumis à l’AGCS. Et l’éducation est, dans presque tous
les pays du monde, un service rendu par les pouvoirs publics, mais également
fourni, en concurrence, par des réseaux privés. L’éducation ne bénéficie
pas de l’exception indiquée ci-dessus.
C’est
la raison pour laquelle, les services de l’OMC ont d’ores et déjà segmenté
le « marché de l’éducation » en 5 secteurs[iv][iv] :
1. secteur primaire : l’enseignement maternel et
l’enseignement primaire ;
2.
secteur secondaire : l’enseignement secondaire du premier et du second
cycle, l’enseignement technique, l’enseignement professionnel et
l’enseignement à destination des handicapés ;
3.
secteur supérieur : l’enseignement technique et professionnel du troisième
degré, l’enseignement universitaire
4.
secteur d’éducation des adultes : cours du jour ou du soir destinés aux
adultes, éducation tout au long de la vie, « open university »,
cours d’alphabétisation, cours par correspondance, cours donnés par la radio
ou la télévision ;
5
secteur des autres services d’enseignement : toutes les autres activités
d’enseignement qui ne peuvent pas être reprises dans les quatre premiers
secteurs, y compris les cours particuliers à domicile.
L’AGCS
agit sur les législations, réglementations et procédures existantes par
diverses approches. Il impose des obligations à tous les Etats membres de
l’OMC et aux pouvoirs subordonnés au travers de quatre modes de fourniture
des services (article 1,2 et, pour le mode 4, Annexe à l’AGCS sur le
mouvement des personnes physiques) :
-
Mode 1 : la fourniture transfrontalière de services ; ex. : une
institution qui dispense des cours dans un pays A et qui en organise également
dans un pays B ; par exemple, les cours à distance : en vertu de
l’AGCS, il y a exportation du pays A vers le pays B ;
-
Mode 2 : la consommation transfrontalière de services ; ex : un
étudiant d’un pays A qui suit des cours dans un pays B : en vertu de
l’AGCS, il y a exportation du pays B vers le pays A ;
-
Mode 3 : un fournisseur de services d’un pays A qui s’installe sur le
territoire d’un pays B ; une université d’un pays A qui s’implante
dans un pays B : en vertu de l’AGCS, il y a exportation du pays A vers le
pays B (on notera qu’on se trouve ici en présence d’un accord multilatéral
sur l’investissement dans le domaine des services) ;
-
Mode 4 : la possibilité pour un fournisseur de services d’un pays A de
faire appel à du personnel d’un pays B, pour une période déterminée, avec
les règles salariales et sociales du pays B ; ex : un établissement
scolaire d’un pays A doté de règles en matière de salaires, de conditions
de travail, de protection sociale qui fait appel pour un an à un enseignant
venant d’un pays B où ces règles sont inexistantes ou moins avantageuses ;
en vertu de l’AGCS, il y a exportation d’un service d’éducation du pays B
vers le pays A.
Les
règles de l’AGCS s’appliquent aux législations, réglementations et procédures
nationales et locales qui concernent ces quatre modes.
A
tous les Etats membres de l’OMC, l’AGCS impose en particulier deux
obligations générales : le traitement de la nation la plus favorisée et
la transparence.
Le
traitement de la nation la plus favorisée oblige chaque Etat à accorder à
tous les fournisseurs de services de tous les Etats membres le même traitement
que celui qu’il accorde au fournisseur de service de l’un d’entre eux. Un
Etat A qui a concédé des immunités fiscales à une entreprise de pompage
d’eau d’un pays B, est obligé de faire une concession identique aux
entreprises de pompage d’eau de tous les Etats membres de l’OMC.
Au
titre de la transparence, chaque Etat doit fournir à l’OMC l’ensemble de
ses législations, réglementations et procédures nationaux et locaux en
rapport avec la fourniture de services. Les USA proposent que ces « mesures »
soient soumises à l’OMC avant d’être approuvées par les institutions
nationale ou locales compétentes. Un certain nombre d’acteurs politiques
européens ne sont pas du tout hostiles à cette proposition comme le démontre
la réaction du président de la Région de Bruxelles à la proposition de
privilégier des produits provenant du commerce équitable pour les cantines des
écoles et des administrations et qui a estimé qu’une telle proposition
devait être préalablement soumise à la Commission européenne et à l’OMC.
L’AGCS
entend aussi soumettre les Etats à des « disciplines » en
matière de subventions afin que celles-ci n’exercent pas des effets de
distorsion sur le commerce des services (article 15) Ces « disciplines »
seront élaborées au sein de l’OMC.
Dès
lors qu’un Etat prend l’engagement de libéraliser un secteur de services
donné, l’AGCS impose des obligations spécifiques. Elles concernent la
transparence, les législations et réglementations intérieures, l’accès au
marché et le traitement national .
Mais
que signifie prendre un engagement ? Cela veut dire tout d’abord que,
lors d’une phase de négociations, l’Etat indique, pour le secteur concerné,
l’état de libéralisation. Cela signifie, automatiquement, que cet état de
libéralisation est protégé contre toute nouvelle forme d’intervention des
pouvoirs publics. L’engagement porte ensuite sur les intentions de l’Etat
par rapport à ce secteur : ce qu’il se propose à libéraliser
davantage, pour quel mode de fourniture de services et, éventuellement, les
limites qu’il impose à ce processus, ces limites au processus de libéralisation
étant susceptibles d’être revues lors d’une autre phase de négociations.
Les limites doivent être formellement indiquées dans une liste d’exemptions
au traitement de la nation la plus favorisée. Cette liste permet de connaître,
pour le secteur concerné, le degré d’application des obligations de l’AGCS
pour chacun des modes de fourniture.
Pour
chaque secteur engagé dans le processus de libéralisation, les obligations spécifiques auxquelles
est soumis chaque Etat se présentent comme suit :
-
au titre de la transparence, fournir à l’OMC au moins chaque année, les
nouvelles dispositions normatives et réglementaires ainsi que les modifications
aux dispositions existantes en rapport avec le secteur concerné ;
-
en ce qui concerne les législations, réglementations et procédures légales
et administratives des pouvoirs centraux, régionaux et locaux des Etats,
celles-ci ne pourront pas être « plus rigoureuses que nécessaire »
afin de ne pas constituer des « obstacles non nécessaires au commerce
des services » (article 6.4). L’AGCS confie à l’OMC le soin d’élaborer
des «disciplines» qui identifieront ces obstacles. Parmi les
propositions en discussion : les critères de définition de l’eau
potable, les normes de qualification professionnelle, les normes de sécurité
sur les lieux de travail, les tarifs préférentiels imposés par les pouvoirs
publics en faveur des personnes nécessiteuses pour l’eau, l’électricité,
le gaz et le téléphone, le salaire minimum garanti… ; on notera qu’en
vertu de l’article 6.5, ces disciplines se substitueront aux « normes
internationales des organisations internationales compétentes » une
fois que l’OMC les aura adoptées ;
-
si des engagements sont pris en matière d’accès aux marchés pour un secteur
donné, l’Etat n’a plus le droit d’imposer une série de limitations
portant sur le nombre de fournisseurs, sur la valeur des transactions, sur le
nombre total d’opérations, sur le nombre de personnes physiques employées,
sur les types d’entités juridiques, sur le volume du capital étranger
investi ;
-
pour tout secteur pour lequel un engagement est pris, la règle du traitement
national s’applique. Elle consiste à accorder aux fournisseurs de services étrangers
le même traitement qu’aux fournisseurs de services nationaux.
Ces
obligations spécifiques ont des conséquences importantes :
a)
quand un pays prend un engagement d’accorder, sans restrictions, un accès au
marché aux fournisseurs de services, cela signifie qu’il doit renoncer au
monopole de service public dans les secteurs concernés ;
b)
quand un pays prend un engagement d’accorder sans restriction le traitement
national à un secteur de services, cela signifie que dans ce secteur, toute
forme de distinction entre secteur marchand et secteur non-marchand doit disparaître,
car il est interdit d’accorder à des services de ce secteur des subventions,
des prêts, des garanties sur prêts, des dons ou quoi que ce soit qui pourrait
altérer la libre concurrence ;
c)
l’application du principe du traitement national conduit, quasi mécaniquement,
de la libéralisation à la privatisation, car les pouvoirs publics seraient
financièrement asphyxiés s’ils devaient respecter ce principe ;
d) ces engagements mettent fin au libre choix démocratique. En effet, les règles
relatives à l’accès au marché et au traitement national vont enlever aux
institutions démocratiques tout pouvoir d’adopter des politiques conformes
aux besoins particuliers de la localité, de la province, du département, de la
région ou de l’Etat. En outre,
une fois un engagement pris, il est de facto irréversible. En effet,
l’article 21 de l’AGCS précise que tout Etat qui voudrait modifier ses
engagements dans un sens qui ne va pas vers plus de libéralisation aurait à négocier
avec tous les autres Etats membres de l’OMC des compensations financières
qu’ils seraient en droit d’exiger. En cas de désaccord, c’est l’organe
de règlement des différends de l’OMC qui trancherait. Comme le constatait l’ancien directeur du Département des Services à
l’OMC, M. David Hartridge, les engagements pris au titre de l’AGCS sont
« effectivement irréversibles. [v][v]» Ce qui signifie très clairement que les
citoyens, au travers des élections, n’ont plus la possibilité de renverser
les choix d’un gouvernement dont les conséquences se seraient avérées
dommageables pour la collectivité.
Une
liberté toute théorique
«Aucun Etat n’est obligé d’engager un secteur de services dans un
processus de libéralisation,» répètent à satiété les défenseurs de
l’AGCS, au premier rang desquels on trouve le Commissaire européen Pascal
Lamy. Mais qu’en est-il vraiment de cette autonomie des Etats par rapport à
l’AGCS ? Que reste-t-il du droit souverain de chaque pays à réglementer
chez lui conformément aux vœux des populations ? Qu’en est-il de cette
prétendue « flexibilité » de l’AGCS sans cesse invoquée par M.
Lamy ?
Observons
tout d’abord que tout Etat, une fois membre de l’OMC, est tenu d’en
appliquer tous les accords. Notons également que l’AGCS impose à tous les
gouvernements le respect d’obligations générales qui ne souffrent aucune
exception. Constatons enfin que, dans le même temps où il tient de tels
propos, Pascal Lamy, avec le soutien des 15 gouvernements européens, propose
d’élever le niveau des engagements, ce qui signifie pousser un maximum de
pays à engager un maximum de secteurs de services dans un processus de libéralisation.
Ainsi, à l’initiative de l’Union européenne, la conférence ministérielle
de l’OMC, réunie à Doha en novembre 2001, a décidé d’un calendrier
incitant les pays à entrer dans ce
processus. L’affirmation du Commissaire européen relève désormais de la théorie,
puisque chaque Etat est soumis aux demandes de libéralisation des autres et est
lui-même obligé d’offrir (c’est
le terme utilisé) des secteurs de services au
Moloch du libre-échange absolu.
Le
30 juin 2002, en application des décisions prises à Doha, la Commission européenne,
au nom des peuples d’Europe, a demandé à 109 pays[vi][vi] de s’engager à libéraliser
un certain nombre de secteurs de services chez eux. Profitant de la complicité
ou de l’indifférence des 15 gouvernements, la Commission, sans s’appuyer
sur la moindre base légale, avait imposé le secret absolu. Grâce à des
citoyens courageux, ces 109 documents ont fort heureusement été divulgués
depuis lors.[vii][vii] On apprend ainsi que, contre
l’avis de plusieurs gouvernements,[viii][viii] la Commission européenne a
demandé aux Etats-Unis de libéraliser le secteur 5 de l’enseignement. La réciproque
est permise.
Selon
la Commission européenne elle-même, les demandes adressées par les Etats
membres de l’OMC à l’Union européenne visent, pour la moitié d’entre
elles la libéralisation des secteurs 3, 4 et 5 du « marché de l’éducation » ;
ces demandes visent les quatre modes de fourniture du service de l’éducation.
Sans préciser lesquels, la Commission annonce qu’ « un certain
nombre de pays demandent l’élimination de toutes les réserves également
pour les secteurs 1 et 2.[ix][ix]»
Des
exceptions en trompe l’œil
Pascal
Lamy [x][x] et les 15 gouvernements de
l’Union européenne s’emploient à étouffer les craintes en affirmant
qu’on ne touchera pas à l’enseignement. Parfois même, ils n’hésitent
pas à dire le contraire de la vérité en affirmant que l’enseignement est
protégé par l’exception invoquée à l’ article 1, 3 b et c de l’AGCS
(voir page 3). Rien n’est plus mensonger. L’AGCS s’applique à chaque pays
où le service de l’enseignement connaît une situation où on se trouve
« en concurrence avec un ou
plusieurs fournisseurs de services. » Ce
qui est le cas de l’immense majorité des pays du monde.
En outre, pour ce qui concerne les
pays de l’Union européenne, la Cour de Justice des Communautés européennes
a statué et considéré que les services d’enseignement ne constituent pas
une activité pratiquée sous l’exercice de l’autorité officielle[xi][xi].
En
1994, lors de la signature des Accords de Marrakech et donc de l’AGCS, les
gouvernements ont eu une première possibilité de prendre des engagements de
libéralisation, mais également de formuler des exemptions à certains de ces
engagements. C’est ainsi que la Commission européenne a pris des engagements
pour les secteurs 1, 2, 3 et 4 (primaire, secondaire, supérieur et d’éducation
des adultes). Ce qui signifie que la Commission européenne s’est engagée à
ne pas imposer de nouvelles mesures qui restreindraient l’entrée de
fournisseurs de services privés, leur accès au marché de l’éducation et la
mobilité du personnel dans ces quatre secteurs. Par contre, la Commission a
formulé des exemptions afin de protéger l’éducation publique dans les
quatre secteurs concernés.
Mais
que valent ces exemptions ? Pascal Lamy se garde bien de rappeler le point
6 de l’Annexe à l’AGCS relative aux exemptions. Ce point dispose que
« en principe les exemptions ne devraient pas dépasser une période de
dix ans. »
Dans
les documents qu’elle a fournis, début 2003, aux 15 gouvernements, sur les
exemptions au traitement de la nation la plus favorisée,[xii][xii] la Commission européenne
indique que les exemptions prises en 1994 et confirmées au début de cette année
sont d’une durée « indéfinie». Mais, un mois plus tôt, dans
un autre document, elle rappelait l’impossibilité de prolonger les exemptions[xiii][xiii].
Alors,
que faut-il en conclure ? Que se passera-t-il en 2004, dix ans après le dépôt
des listes d’exemptions sur l’éducation ? L’éducation publique
survivra-t-elle à la fin des exemptions ?
La
duplicité des gouvernements et l’opacité qui entoure ces négociations, tant
au niveau des institutions européennes que de l’OMC, placent, comme le
souligne l’Internationale de l’Education,[xiv][xiv] les populations et les
premiers concernés (parents, enseignants, élèves) « devant des faits
accomplis sans qu’ils aient pu exprimer leur point de vue. » On est
bien revenu au 19e siècle.
Dr
Raoul Marc JENNAR
NOTES
[i][i]
OMC, S/C/W/49, 23
septembre 1998, (98-3691) &
classification de l’OMC : doc MTN-GNS/W/120. Le document a reçu
depuis lors un nouveau titre : les services de l’enseignement.
[ii][ii]
Le Monde,
28 janvier 2003.
[iii][iii]
JENNAR (Raoul Marc),
L’Organisation mondiale du commerce et le déclin de la démocratie,
in Res publica, février 2003, n°32 p.36-41.
[iv][iv]
voir note 1
[v][v]
HARTIDGE (David), What the General Agreement on Trade in Services can do.
Communication présentée à Londres le 8 janvier 1997 lors d’un
colloque organisé sur le thème « Opening markets for banking
worldwide : the WTO General Agreement on Trade in Services” par
British Invisibles et le cabinet conseil Clifford Chance.
[vi][vi]
dont 94 sont classés comme pays en développement et, parmi ceux-ci, 29 qui
figurent parmi les pays les plus pauvres du monde. Aussi longtemps que ces
demandes étaient secrètes, le Commissaire Lamy affirmait qu’aucune
demande n’était adressée à ces derniers…
[vii][vii]
Ils sont disponibles sur le site: http://www.gatswatch.org/requests-offers.html.
De même, les offres européennes de libéralisation déposées au printemps 2003 sont également accessibles sur
le même site.
[viii][viii]
Autriche, Belgique, Finlande et Suède. Voir http://www.urfig.org/francais.htm
: campagne agcs : La
position belge concernant les relations entre Education et Accord Général
sur le Commerce des Services (30 août 2002).
[ix][ix]
European Commission, Directorate-General for Trade, WTO Members’ Requests
to the EC and its Member States for Improved Market Access for Services;
consultation document, 12 November 2002.
[x][x]
Le Monde,
6 février 2003.
[xi][xi]
Cour de Justice des Communautés Européennes, affaire 147/86 :
Commission européenne versus République de Grèce, Rec. 1637.
[xii][xii]
voir le site http://www.gatswatch.org/requests-offers.html.
[xiii][xiii]
Voir note 7.
[xiv][xiv]
Internationale de
l’Education, 5, bd Albert II, B 1210 Bruxelles, Belgique ; site Web :
www.ei-ie.org